Travail réalisé pour le cours de Podcast

Crédits : Juliette Miglierina

Le 27 mai prochain, la nouvelle loi sur la fin de vie fera son apparition à l’Assemblée Nationale. Elle viendra compléter la loi Claeys-Leonetti en abordant un prisme encore jamais vu en France, celui de l’aide à mourir. Si le projet provoque une grande réticence chez les soignants, il reste tant attendu par plus de 70% des français. Une traversée aux côtés de cette loi, qui côtoie la mort de près. En pactisant avec elle pour construire ses stratégies, elle bouscule les codes de notre société, qui se divise de plus en plus sur le sujet. 
Actuellement, pour nous guider vers la fin de notre existence, nous avons la loi Claeys-Leonetti. Mise en place depuis 2016, elle renforce les éléments de la loi Leonetti de 2005 en prévoyant un accès universel aux soins palliatifs, qui visent à améliorer les derniers instants des malades. Le but est de soulager leurs souffrances, en renforçant leurs soutien émotionnel, social, et spirituel. On parle également de sédation profonde et continue qui permet d’endormir jusqu’au décès pour éviter les douleurs insurmontables. Une loi qui respecte la volonté de chacun par des directives anticipées transmises au corps médical. Enfin, la loi Claeys-Leonetti cherche à garantir une fin de vie digne et respectueuse des choix individuels.
Bien qu’elle assure la « non-obstination déraisonnable » et « l’acharnement thérapeutique », elle refuse catégoriquement l’idée de l’euthanasie et du suicide assisté. L’obstacle que rencontre cette loi se trouve plutôt du côté des condamnés, ne désirant pas toujours laisser pour dernier acte, l’image d’un corps affaibli. Alors, pour ne pas ternir les souvenirs de leurs proches, certaines personnes se rendent dans les pays voisins comme la Suisse et la Belgique, où ces pratiques sont autorisées. C’est notamment le cas de Françoise Gauthier, malade d’un cancer du rectum, qui s’est déplacé jusqu’à Liège pour se faire euthanasier. Un extrait de sa parole dans le documentaire « Fin de vie : pour que tu aies le choix » diffusé sur France télévision. 
Afin d’éviter la répétition de ces cas de figure, le gouvernement français a décidé de se pencher sur le sujet. Dans sa promesse de campagne en 2017, Emmanuel Macron évoquait la mise en vigueur d’une aide à mourir « sous certaines conditions ». Dans un premier temps, l’idée du projet est passée entre les mains du CCNE (le Conseil Consultatif National d’Éthique). Le feu vert est donné en septembre 2022 pour la création d’une "aide active à mourir" strictement encadrée. 
Souhaitant impliquer les premiers concernés au cœur de cette thématique, le président de la république lance 3 mois plus tard, la Convention Citoyenne sur la fin de vie. Au total, 184 personnes ont été sélectionnées selon différents critères comme l’âge ou encore le genre. Jusqu’en avril 2023, les participants ont échangé, débattu, et enfin, trouvé un terrain d’entente au Palais d’Iena. Résultat des votes : 76% pour face à 23% contre. Le constat est clair : il est donc indispensable de faire évoluer la loi actuelle. 
Le 10 mars dernier, le chef de l’état a présenté toutes les mesures de ce projet dans un entretien recueilli par La Croix et Libération. Il précise que seules les personnes majeures, capables d’un « discernement plein et entier » seraient concernés. Les patients pouvant bénéficier de cette aide à mourir devront être atteints d’une maladie ou pathologie incurable, dont le pronostic vital est engagé à court ou moyen terme. En proie à des souffrances réfractaires, ne pouvant être soulagées par aucun traitement, ils pourront formuler leur demande qui sera étudiée par un collège de médecin. Si le verdict est favorable après 15 jours de discussion, ils se verront prescrire un produit létal, valable pendant 3 mois. Il pourra être absorbé personnellement si l’état le permet. Dans le cas contraire, il sera donné par un soignant ou un volontaire préalablement désigné. 
Le terme « aide à mourir » a été choisi avec soin. Toujours dans la même interview, Emmanuel Macron refuse de parler d’ « euthanasie » et de « suicide assisté ». Des appellations qu’il perçoit comme infidèles aux valeurs de notre société. Il ajoute que cette loi reflète la fraternité, en conciliant l’autonomie de l’individu et la solidarité de la nation. Un projet qui selon lui, nous fait « regarder la mort en face », citation qu’il emprunte d’ailleurs à Epicure. 
Mettre un terme à ses jours représente un tabou omniprésent en France, qui ne date pas d’hier. Bien avant le moyen-âge, c’était le christianisme qui prenait le dessus. L’idée d’une « bonne mort » est avant tout précédée par une agonie. Et pour atteindre l’absolution, la finalité devait se faire en souffrance, afin de ressentir les mêmes douleurs que le Christ. À l’inverse, l’acte de se donner la mort ou de se la faire administrer était inconcevable puisque toute fin non-naturelle mène son auteur aux portes de l’enfer. 
Pourtant, d’un point de vue étymologique, le terme « euthanasie », d’origine grecque, signifie… « Bonne mort ». Un sacré paradoxe qui en fait pâlir plus d’un, mais qui ne détrône pas la vision chrétienne ancrée dans le marbre de nos valeurs sociétales. 
Par ailleurs, le sujet provoque un réel un malaise chez les soignants. Cela dit, si certains médecins pensent que « l’acte de faire mourir n’est pas un acte de soin », d’autre comme Denis Labayle, ayant déjà pratiqué l’euthanasie illégalement en France contre argumente cette opinion. 
Quoi qu’il en soit, si cette nouvelle loi suscite des réactions diamétralement opposées, elle connaîtra sa sentence dans les prochains mois. Discutée par les parlementaires qui seront susceptibles de la modifier, elle risque de voir son chemin s’allonger en fonction du débat qu’elle va provoquer. On dit souvent que la mort n’attend pas. Mais cette fois-ci, elle devra être patiente pour atteindre pleinement son heure de gloire. La grande faucheuse, celle qui paralyse le peuple français depuis des décennies, pourrait-elle redorer son blason grâce à ce projet de loi ? 
Les extraits que vous avez entendus dans ce podcast sont issus du documentaire « Fin de vie : pour que tu aies le choix » réalisé par Magali Cotard et présenté par Marina Carrère d'Encausse pour France télévision. 

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